Vapotage : notre mobilisation face au débat parlementaire sur la surtaxe envisagée

Nov 20, 2025 | Opinions

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Alors que l’Assemblée nationale et le Sénat examinent cette semaine l’article 23 du projet de loi de finances, nous nous mobilisons pour rappeler une évidence trop souvent oubliée : le vapotage n’est pas un produit du tabac, mais un outil majeur de réduction des risques. L’assimiler au tabac par une surtaxe et un régime d’accise reviendrait à brouiller cette distinction pourtant essentielle pour la santé publique.

À l’occasion de ce débat, nous présentons aux parlementaires une note d’analyse rédigée par Yann Bisiou, Jean-Pierre Couteron et Béchir Saket, disponible ici : Note vapotage – Novembre 2025 – Groupe Santé Addictions. Cette note rappelle les données scientifiques, l’expérience internationale et les exigences du droit européen qui devraient guider toute régulation du vapotage.

Un outil efficace de sortie du tabac, menacé par une fiscalité inadaptée

Plus de 3 millions d’adultes vapotent régulièrement en France, dont une grande majorité d’anciens fumeurs. Près de 4 millions de personnes ont pu arrêter ou réduire très fortement leur consommation de cigarettes grâce au vapotage. Les analyses de Santé publique France confirment cette dynamique, et les travaux du Royal College of Physicians ou de la Cochrane attestent que le vapotage est aujourd’hui l’outil de sevrage le plus efficace disponible.

Pourtant, l’article 23 du PLF 2026 propose :

  • d’instaurer une accise alignée sur celle du tabac combustible

  • d’interdire la vente en ligne

  • de réserver la distribution aux buralistes

  • de durcir le régime de sanctions

Pris ensemble, ces choix conduisent à assimiler le vapotage au tabac, à renchérir fortement les produits, et à fragiliser les boutiques spécialisées, qui sont pourtant les seuls lieux capables d’accompagner les fumeurs de manière personnalisée.

L’expérience italienne de 2019 l’a montré : une fiscalité disproportionnée sur les produits de vapotage entraîne à la fois un retour massif à la cigarette et un essor du marché parallèle. Rien, dans les données scientifiques, ne justifie de répéter cette erreur.

Un cadre juridique européen incompatible avec une accise nationale

Notre note rappelle également que la création d’une accise nationale sur les produits du vapotage serait contraire au cadre européen. Les droits d’accise sur les tabacs manufacturés sont totalement harmonisés, et aucun État membre ne peut en étendre unilatéralement le périmètre. La Cour de justice de l’Union européenne l’a rappelé dans plusieurs arrêts récents.

Pour modifier la directive existante, l’unanimité des États membres serait requise, unanimité aujourd’hui impossible. À cela s’ajoute l’obligation de notification préalable à la Commission européenne, en vertu de la directive 2015/1535, faute de quoi la mesure serait inopposable.

En d’autres termes : la surtaxation proposée n’est pas seulement problématique du point de vue sanitaire ; elle est juridiquement fragile et pourrait être invalidée.

Protéger les jeunes, oui ; décourager les fumeurs adultes, non

Nous partageons entièrement la nécessité de protéger les mineurs. Limiter l’attractivité des arômes, contrôler les pratiques commerciales ou lutter contre la viralité des réseaux sociaux sont des mesures indispensables. Mais cette vigilance ne peut se traduire par une politique qui rend plus difficile l’accès à un outil dont l’efficacité pour les fumeurs adultes est démontrée.

La vraie menace sanitaire reste la cigarette combustible, responsable de 75 000 décès par an en France. Alourdir la fiscalité du vapotage reviendrait à rendre plus attractif… le produit le plus mortel du marché.

Nous appelons donc les parlementaires à supprimer les dispositions relatives au vapotage dans l’article 23 et à engager, comme nous le proposons dans notre note, une mission d’information parlementaire consacrée à une régulation équilibrée : protection renforcée des jeunes, information claire du public, soutien au sevrage et valorisation des outils de réduction des risques.

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